03 – Doubs > l’Alsace (km 450 – km 850)

  • Pontarlier – Gillez – Pierrefontaine les Varans (bivouac)
  • Pierrefontaine les Varans – Bourguignon – Montbéliard (WarmShower)
  • Montbéliard – Mulhouse – Munwiller (bivouac)
  • Munwiller – Colmar – Sélestat (WarmShower)
  • Sélestat – Plobsheim – Strasbourg (amis) – Lingolsheim (location)

L’ancienne voie de chemin de fer de Pontarlier à Gillez est un ravissement pour les yeux et pour les genoux ! D’autant que nous partons avec le ciel de traîne, après le passage du front tant redouté. Nous sommes interpellés par nos prénoms à Gillez. Qui peut bien nous reconnaître ici ? C’est Hugo, ingénieur forestier qui nous a accueillis trois jours plus tôt chez lui, et qui nous a aperçus depuis son bureau de l’ONF. Grâce à lui, nous en savons un peu plus sur la gestion des forêts publiques, qui représentent, à notre surprise, moins d’un quart des forêts du pays.

Des nuées d’étourneaux se sont posées dans les champs, envahissant le silence de la descente du Doubs par le vacarme de leurs vocalises. Ascension du col de Tounet où l’on nous encourage : « z’êtes bientôt au d’ssus », prononcé avec un tel accent que Gabriel a pris ça pour un idiome étranger. Descente sur Orchamps-Vennes puis un crochet à Loray, et nous voilà en recherche de bivouac juste avant Pierrefontaine-les-Varans. Le jour baisse, nous obliquons sur une route de campagne à l’écart de notre itinéraire. Les champs sont bordés d’épaisses haies. L’opération « discrétion » commence : s’engager au-delà de la clôture, traverser un premier champ en friche, puis un deuxième, retirer nos gilets et casques fluo, coucher nos vélos derrière les taillis, puis s’assoir un instant pour sonder la qualité de l’emplacement. Les promeneurs peuvent ils nous apercevoir ? Les chiens pourraient-ils nous sentir ? Les automobilistes sont-ils assez loin ? Ce bruit de tronçonneuse: se rapproche-t-il ? Ce bivouac se révèlera idéal, bien orienté par rapport au soleil, relativement silencieux. Les taillis d’en face nous offrirons même la visite d’une Pie-grièche grise, chantonnant sur sa branche d’aubépine dans les derniers rayons du soleil. Nous dormons par intermittence, comme c’est souvent le cas dehors. Le ululement de la Chouette hulotte remplit l’espace, tout comme les pointes de vitesse de certains excités nocturnes d’une autre espèce, sur la départementale au loin.

Toujours dans la campagne franc comtoise, nous sommes impressionnés par la taille des fermes à Comté. Nous apprendrons plus tard que l’intensité de l’élevage de vaches laitières pollue les cours d’eau, expliquant la piètre qualité de l’eau potable. Quand on est habitués à celle de Grenoble, on détecte tout de suite ce genre de détail! Quelques parcelles de forêts mixtes nous donnent l’occasion de surprendre le Pic noir, qui doit déjà avoir trouvé sa moitié et creusé sa loge. Nous arrivons à Péseux, et à partir de ce point, nous usons nos patins de freins pour descendre aussi vite que la rivière Barbèche, qui se glisse dans le Doubs à Villars-sous-Damjoux. S’ensuivent des portions plus urbaines jusqu’à Bourguignon, où Marine propose une virée sur un étang, quasiment inaccessible sur un chemin bien boueux. Les garde-boues sont tellement remplis qu’ils finissent par bloquer la roue arrière. On enlèvera tout ce torchis à l’aide de la fourchette prévue à cet effet (Merci Hélène D. pour ce précieux conseil !), et en se promettant de ne plus emprunter de route non revêtue. Tout ça pour voir des Harles bièvres et des Grands cormorans…

Ravitaillement en périphérie de Montbéliard, avant de rejoindre le centre ville et son château. A peine installés sur les derniers bancs au soleil de la place Denfert-Rochereau, un bavard nous accoste et nous apprend les mauvaises nouvelles: l’Ukraine a été bombardée ce matin. Nous étions coupés des actualités récentes, et cet événement nous casse le moral. Nous avançons l’esprit mitigé jusqu’à Béthoncourt, où nous sommes accueillis chez Odile et Denis, deux jeunes retraités voyageurs et militants, pour un monde avec plus de vélo et moins de bêtises! Accueil chaleureux et ultra-confortable qui nous épargnera une nuit sous la pluie.

A partir de Montbéliard, la route est très facile : nous suivons l’euro-vélo 6 le long du canal du Rhône au Rhin: une enfilade d’écluses, le vent dans le dos jusqu’à Mulhouse. Une journée à 90km au compteur, une première ! Passage très bref dans la ville sous la grisaille, que nous cherchons à dépasser pour trouver un bivouac à l’écart des zones urbanisées. A Ensisheim nous cherchons de l’eau au cimetière, en vain: l’eau est coupée à cause du gel. Par chance, une habitante qui s’y recueillait nous invite chez elle et nous remplit nos gourdes. Nous trouvons notre bivouac à l’entrée de Munwiller, à côté d’un étang minuscule et grillagé. Nouvelle opération « discrétion » qui s’avère concluante. Nous sommes réveillés par les averses à 4h du matin, et bien surpris au réveil de voir que toutes les gouttes qui perlent sur la toile de tente sont gelées! Avant de la replier, il faudra tout gratter…

Nous avons vraiment la sensation de pénétrer en Alsace ce Samedi 26 Février : nous croisons une cigogne au ras des arbres, une branche dans le bec et qui remonte sur le clocher de Munwiller avant de s’y accoupler au nid. Les maisons colorées à colombages égayent notre chemin, les volets sont sculptés de petits cœurs, et la boulangère parle un patois inconnu aux clients qui nous précèdent. Nous virons de bord à l’Ouest pour nous rapprocher des Vosges et suivons la voie vélo qui passe dans les vignes des côteaux jusqu’à Colmar. Enfin, pas tout à fait jusqu’à Colmar puisque nous nous égarons dans les futurs champs de maïs du Sud de l’agglomération (nouvel épisode à fourchette de garde-boue au passage). On arrive péniblement devant la collégiale Saint-Martin pour filer rapidement dans la zone commerciale. Objectif : decathlon !

Marine avait réservé quelque jours plus tôt la dernière roue arrière du magasin, en vue de remplacer la sienne qui présentait une fissure sur le flan. Le passage dans les pistes de l’étang de Bourguignon a aggravé le désordre, il était plus qu’urgent de la changer. Environ 100 km séparait le lieu où l’on a décidé de la remplacer, et le salvateur atelier de Decathlon. 100km où Marine n’était vraiment pas rassurée, contrôlant avec inquiétude l’évolution de la fissure. L’équipe de l’atelier a offert le montage sans même décharger les sacoches et en une demi-heure le vélo était paré d’une belle jante bien brillante. Les roues de Gabriel présentaient elles aussi des signes d’usure similaires, mais les pièces étant en rupture de stock dans toute l’Alsace, il fallait attendre Strasbourg pour en trouver. Nous profitons du soleil pour faire sécher la tente sur l’aire de stationnement de Décathlon, avant de rejoindre l’euro-vélo 5. Nous sommes attendus chez Olivier, instit’ de CM1 à Sélestat et cycliste évidemment. Très sympathique, il nous offre son clic-clac pour une nuit bien reposante. Il nous accompagne même un bout de chemin le lendemain matin (malgré le froid qui pince fort !), non sans nous avoir montré le joli centre de Sélestat. La goutte au nez et les yeux qui pleurent de froid, nous faisons nos aurevoirs une fois sur la piste cyclable de Muttersholtz. Nous emportons de délicieux bonbons vosgiens à la fraise des bois, offerts par Olivier, qui nous régaleront le long de notre parcours.

Après ces détours par Colmar et Sélestat pour régler nos contingences techniques, nous rejoignons notre itinéraire initial sur le Canal du Rhône au Rhin à la hauteur de Bindernheim. L’euro-vélo 15 nous mène tranquillement à Plobsheim au Sud de Strasbourg, au croisement du canal, de celui de l’Ill (ce n’est pas un chiffre romain mais l’orthographe de la rivière « ill » avec une majuscule) qui se décharge dans le Rhin. Nous déjeunons à proximité d’une base nautique, sur les bords de cet élargissement du fleuve que nous abordons pour la première fois. Les canards semblent préférer la rive opposée, où Marine retournera plus tard pour observer plus attentivement les Tadornes de Belon et les Canards pilets. Une vingtaine de kilomètres plus tard nous sommes au cœur de Strasbourg. Nous nous remémorons les lieux visités ensemble lors de la rencontre des Urban Sketchers de 2015. Le soir nous sommes accueillis par Nicolas, un « ami-d’ami » qui nous ouvre les portes de sa jolie maison aux volets rouges, dans le quartier Sud de Neuhof. Apéro alsacien avec cet amateur de spéléologie et de beaux cailloux, rejoint par son fils Marien et Geneu sa compagne. Des personnes adorables dont on emporte leurs encouragements, et leur enthousiasme pour notre projet.

Objectif : Decathlon (bis) ! Direction Geipolsheim, en banlieue Sud Ouest de Strasbourg, à l’opposé de notre point de chute pour retirer les pièces commandées deux jours auparavant. Le parvis du magasin se transforme en atelier bricolage, sous le regard des employés en pause cigarette. Gabriel change donc la jante avant et la jante arrière, par prudence. Les témoins d’usure avaient disparu, et les flancs étaient légèrement incurvés (usés par les patins de freins) signifiant un manque de matière compromettant la solidité du profil. Deux heures plus tard, nous posons nos sacoches à Lingolsheim, dans un appartement que nous avons loué pour nous reposer et faire le point avant de traverser la frontière.

Merci à Odile et Denis de Montbéliard, et à Olivier notre hôte à Sélestat. A l’atelier de Decathlon Colmar pour la prise en charge gracieuse du vélo de Marine. Un grand merci à la famille de Nicolas et Geneu à Strasbourg. A notre hôte Josiane à Lingolsheim qui nous a généreusement offert une nuit de plus, notre repos ayant été interrompu par des travaux de maçonnerie lourde à 8h du matin!

Aurevoir Strasbourg ! Espérons que l’anticyclone s’installe durablement sur l’Allemagne

5 réflexions sur “03 – Doubs > l’Alsace (km 450 – km 850)”

  1. Magnifiques toutes ces photos ! Je vois que la voie par Colmar était plus sûre . Des bises à vous,les Alsaciens de passage!!

  2. Bénédicte Thierry Naudet

    Mille mercis pour vos superbes photos et vos compte-rendus de route. Je vois que les jumelles ne sont pas restées au fond de la sacoche ! Gab à l’air de très bien débrouiller en mécanique : bravo, car ce n’est pas toujours facile.
    Bonne route à vous. Bénédicte et Thierry

    1. Merci Thierry et Bénédicte !
      Les jumelles sont toujours bien à portée de main 😉
      Désolés pour les photos avec des légendes trop grosses, on a du mal à trouver le réglage…

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