- Strasbourg – Delta de la Sauer – Mothern (bivouac)
- Mothern – Jockgrim – Mechtersheim (bivouac)
- Mechtersheim – Manheim – Gernsheim (bivouac)
- Gernsheim – Frankfurt (hôtel)
Nous quittons Strasbourg Jeudi 3 Mars au petit matin. Après ces quelques jours de repos, nous avons organisé notre itinéraire pour être rapidement à Brême où nous serons accueillis dans la famille de Marine. Nous faisons une croix sur les méandres du Rhin et traçons une route plus directe, et plus urbanisée. Notre cadence sera désormais de l’ordre de 60 km par jour pendant 4 jours, suivie d’une journée de repos et ce jusqu’au 18 Mars.
Dès les premiers tours de pédalier, nous guettons le moindre bruit suspect suite au remplacement de nos chaines de transmission. Cinq minutes plus tard : faux départ pour Gabriel qui a détecté une anomalie. Le circuit de la chaine était mal installé, obligeant les cyclopithèques à un intermède mécanique pour ouvrir la fourchette du dérailleur (ce terme désigne la double patte métallique qui maintient les galets). Nous longeons la voie ferrée et les jardins familiaux de la périphérie, le tout sur un itinéraire dédié aux cyclistes. Et en ville, ça fait du bien.
Heure de pointe, impatience des voitures… La sortie de ville est fastidieuse et bruyante dans les pots d’échappement et les coups d’accélérateurs. Etrangers à tout ce monde qui-doit-être-à-9-heures-quelque part, nous avançons à contre-courant, traversant toutes ces bourgades aujourd’hui englouties dans l’agglomération. Nous nous retrouvons à rouler pour la suite de la journée sur des accotements peu passionnants de routes départementales. La campagne du Bas-Rhin est monotone, des champs de betteraves et de maïs à perte de vue.
Nous ne retrouvons les bords du Rhin qu’en fin de journée, au niveau d’une gravière pour y observer les oiseaux. Quelques Grèbes huppés, des Fuligules morillons et autres Canards chipeaux, le tout dans les grelottements de bec des cigognes nichant sur la rive opposée. La plage aurait constitué un endroit idéal pour bivouaquer mais nous devons encore avancer de 10km (outre le fait que le camping y est interdit). C’est juste après la réserve du Delta de la Sauer que nous déposons nos sacoches.
Le lendemain nous offre un joli parcours dans la forêt de Lauterbourg, où nous franchissons la frontière sans nous en apercevoir. Il faut dire que les Pics épeiches parlent la même langue de l’un et l’autre côté. Ici les forêts protégées côtoient d’immenses exploitations de graviers, une curieuse association que l’on retrouvera aussi côté allemand. Le premier contact avec l’Allemagne est donc le village de Neuburg am Rhein, où nous cherchons les indices de cette frontière invisible: les maisons colorées et bien alignées, les panneaux solaires en quantité, les rues propres, les jolis vélos, les grosses voitures.
Pause déjeuner à Jockgrim, village érigé sur des remparts du XIVème siècle, nécessitant pour y accéder de passer sur le petit braquet, pour la première fois depuis bien longtemps. Pendant que Gabriel regonfle les pneus d’une cycliste de passage qui le gratifie d’un « You saved me ! », Marine tente de chercher un point d’eau du côté des jardins familiaux, à l’arrière des maisons à colombage. C’est dans un allemand très approximatif qu’elle fait remplir sa gourde auprès d’un couple qui prenait un bain de soleil.
« C’est curieux, on m’a demandé si je préférais avec ou sans gaz, alors qu’on ne boit que de l’eau plate, nous. » L’eau minérale de base est en effet de l’eau pétillante dans les magasins. Et si on ne sait pas lire les étiquettes, on finit par faire cuire les pâtes dans l’eau gazeuse (histoire vraie).
Après une micro-insolation à Jockgrim, on file droit vers Germersheim pour installer notre tente au pied d’une digue enherbée, parfaitement tondue. Ce bivouac donne sur une clairière bordée de feuillus boursoufflés de gui, dominée par une hutte de chasseurs. Nous redoutons les visites nocturnes de type sangliforme (suite à un épisode dans la descente de la Dordogne en kayak) alors nous inspectons les lieux. La terre est-elle retournée ? Et cette trouée dans les herbes, est-ce que ça ne ressemblerait pas à un passage de marcassin ? On respire l’odeur des herbes sèches mouillées mélangées à la terre humide, puis on s’installe tout près d’une meule de foin.
On passera finalement une nuit très tranquille, mais avec un réveil glacial à -4°C. Nous assistons à un extraordinaire concert de tambourinages de pic au lever du soleil. Se répondant les uns aux autres sur des notes qui laissent deviner l’arbre sur lequel ils se trouvent, un tronc sec pour les notes aiguës, un autre plus meuble pour les notes graves.
Nous passons par Speyer et Manheim où l’on retrouve le bouillonnement de la ville. On n’est pas vraiment à l’aise dans cette alternance de rase campagne terne (nous qui venons des montagnes) et de centres urbains bruyants. On enchaine les lignes droites, reliant des châteaux d’eau, des clochers, des tours, des immeubles, que l’on aperçoit dès la sortie du bourg traversé. Quelques rencontres inattendues avec des oiseaux : une buse qui se pose juste à une longueur de vélo, nous suivant d’un regard curieux, ou encore une petite troupe de Pluviers dorés et de Vanneaux huppés picorant dans les champs… Ces adorables petits limicoles migreront peut-être avec nous jusqu’en Suède, qui sait ?
Au Sud de Gernsheim nous montons la tente au pied d’une digue -encore une, car le talus nous permet d’être à l’abri des regards. Sauf de celui des enfants aventureux et des promeneurs de chiens, qui utilisent la digue comme chemin de ronde. On nous souhaite amicalement bon appétit et bonne nuit. Le lendemain, direction Francfort, dans une interminable succession de grandes lignes droites, côtoyant les SUV et les grosses cylindrées rugissantes (on voit des Ferrari et des Porsche plus fréquemment à mesure qu’on approche). On pédale la tête dans le guidon jusqu’à descendre sur la rivière du Main, un dénivelé qu’on n’aurait pas imaginé : Quand est-ce qu’on aurait pris de la hauteur, au fait ?
Ce répit sera mis à profit pour délasser nos mollets éprouvés, reposer nos yeux échauffés par la clarté des journées, et surtout enduire nos visages de crème réparatrice. On a bonne mine, certes, mais les narines sont irritées par le sur-mouchage de goutte-au-nez, et nos lèvres gercées craquent quand on sourit trop fort !
Marine en profitera aussi pour partir en excursion au Lac de Langener Waldsee, à une quinzaine de km au Sud de Francfort. Jour de repose oblige, le vélo sera embarqué dans le train suburbain. Une excursion récompensée par une Pie-grièche grise perchée, deux Plongeons catmarins au milieu du plan d’eau, une mignonne Harle piette parmi les Foulques macroules, le cri des Pics noirs et un Pic cendré dans le bois attenant.
Autre bonne surprise de notre séjour à Francfort, Phil nous a rejoint en un coup de train dans le même hôtel. Nous découvrons pour la première fois le visage jovial de ce grand gaillard suisse, qui nous a contactés avant notre départ (via Facebook), et qui ne compte plus le temps passé en itinérance sur son vélo. Nous pédalerons à trois pour quelques jours, car nous allons dans la même direction. Rendez-vous demain le 8 Mars à 8h30 au pied de l’immeuble, vélo chargé !
Trop bien de rouler dans ma tête avec vous !
Des bises
JeanDa
Merci Jean-Dav ! Bises de tous les deux !
Beaucoup de plaisir à lire votre périple à travers vos billets détaillés et si bien documentés !
Quel courage vous avez de rouler dans des conditions qui pour ma part me semble parfois dantesques… 😉
Hallo Hélène !
Merci merci, on fait comme on peut pour vous donner des nouvelles et ça nous fait plaisir d’être lus ! On continue alors !
Chouette de voir que vous profitez de votre voyage et hâte de savoir la suite.
La question qui me brûle les lèvres est la suivante : les pâtes à l’eau gazeuse avaient-elles un goût différent ?!
Vos arbres bourgeonnent sur notre terrasse, vive le printemps !
Haha, les pâtes n’avaient pas de goût particulier à cause de l’eau gazeuse, ouf!
Merci Clémence, et joyeux équinoxe du Printemps à tous les trois !!